Premier sacrement de l'initiation
chrétienne, le baptême (u battesimu) est
moment essentiel et un évènement important de la vie. En
corse, le baptême est non seulement un acte religieux
mais il a également une fonction sociale bien
précise. Jadis, la mortalité infantile
était très élevée, et l'on redoutait que l'enfant ne
meurt avant d'avoir été baptisé par le curé du village.
Dans le mois qui suivait la naissance, on se dépêchait
donc de lui donner le sacrement du baptême car si
l'enfant venait à mourir, son esprit païen deviendrait
un feu follet hantant les cimetières certaines nuits de
pleine lune.
Au cours de la préparation donnant
lieu à la cérémonie du baptême, on choisissait le
parrain (u cumpare) et la marraine (
a cummare) en évitant de les prendre parmi
les membres de la famille. Pour un Corse, cela n'avait
aucun sens car la famille était particulièrement
solidaire et il était plus utile de choisir le parrain
et la marraine en dehors de la parenté; ainsi on
élargissait le cercle de ses relations tout en
établissant des liens solides de sang pour être plus
forts face à l'adversité.
Une jeune fille n'acceptait pas
d'être la marraine d'une fille si elle ne l'était pas
déjà d'un garçon, car en se mariant elle risquait de
n'avoir que des filles. De même, on ne choisissait jamais
une femme enceinte pour marraine car cela risquait de
porte malheur à l'enfant.
Autrefois, les femmes accouchaient
dans leur village et la cérémonie du baptême avait lieu
tout de suite après. La mère de l'enfant était par la
force des choses exclue de la cérémonie et c'était
l'accoucheuse (a mammana) ou à défaut une
grand-mère, qui portait le bébé entouré de
cumpare e cumare.
Dans l'église, toute l'assemblée
est extrêmement attentive; il en va de l'avenir de
l'enfant. Ce sont uniquement le parrain et la marraine
qui tiennent l'enfant. Ce dernier ne doit pas dormir
durant le sacrement car il raterait son entrée dans le
monde de la chrétienté; par ailleurs, si le parrain ou
la marraine se trompent en récitant le Credo l'enfant
sera poursuivi par le malheur et il deviendra plus tard
un mazzeru (sorcier) ou una stegha
(sorcière).
Dès qu'elle en a la possibilité,
la mère, portant son enfant dans ses bras, va faire le
tour du village. La croyance populaire veut que le bébé
qui pénètre dans une maison apporte à ses habitants le
bonheur; en retour, il reçoit de la patronne de la
maison visitée, un oeuf, une pincée de sel et une
allumette, respectivement symboles d'intelligence, de
sagesse et de droiture. |